MONTREAL — Julie Snyder, l’une des figures emblématiques de la télévision québécoise, a témoigné jeudi lors d’un procès civil, affirmant avoir été agressée sexuellement par Gilbert Rozon, fondateur de Juste pour rire, à Paris il y a plus de trois décennies.

Snyder a relaté son expérience dans le cadre d’une plainte civile d’un montant presque 14 millions de dollars, déposée contre Rozon, aujourd’hui âgé de 70 ans, par neuf femmes — à l’exception de Snyder — qui poursuivent ce magnat de l’humour.

En 1991, alors âgée de 23 ans et animatrice de l’émission de télévision “Sortir”, Snyder s’était rendue à Paris pour des raisons professionnelles. Souhaitant prolonger son séjour pour skier avec des amis, elle a été invitée à séjourner dans l’appartement de l’entreprise Juste pour rire.

Au troisième jour de son séjour, Rozon a fait une apparition. Ils ont échangé quelques mots, a déclaré Snyder. Par la suite, elle s’est rendue dans sa chambre, mais a été réveillée par une sensation de pression sur son dos.

« J’ai ouvert les yeux et j’ai vu une main sur ma poitrine… Je ressentais quelque chose à l’intérieur de moi. Je sentais mes pyjamas tirés vers l’intérieur. Je ressentais des poussées », a-t-elle témoigné devant le tribunal.

Dans un premier temps, elle a pensé être attaquée par un intrus.

« Quand je me suis retournée, j’ai ressenti un soulagement en voyant que ce n’était pas un criminel armé d’un couteau. J’ai reconnu le visage de Gilbert Rozon », a-t-elle ajouté. Elle a d’abord cru qu’il s’était trompé de chambre, mais a vite réalisé que ce n’était pas le cas, Rozon étant nu devant elle.

« C’était comme s’il était dans un état second. Ce n’était pas la même personne. Ses yeux étaient exorbités, il avait un regard fou sur le visage et ne parlait pas », a-t-elle déclaré.

« Je me suis dit que je n’allais pas être tuée, mais que j’allais être violée. »

Snyder a expliqué avoir demandé à aller aux toilettes, mais une fois à l’intérieur, elle a décidé de s’échapper. En annonçant à Rozon qu’elle voulait préparer un café, elle a plutôt pris son sac à main et s’est enfuie.

« Quand je suis arrivée dans la rue, j’ai couru pour ma vie. J’ai couru comme jamais auparavant », a-t-elle témoigné.

« Je n’en ai même pas parlé à ma mère », a-t-elle ajouté, expliquant qu’elle ne voulait pas dénoncer Rozon, un homme qu’elle considérait comme l’une des figures les plus puissantes et influentes du Québec, de peur d’être jugée et de voir sa carrière mise en péril.

Snyder a finalement confié son secret à un collègue en 1998. Après que Gilbert Rozon ait plaidé coupable d’agression sexuelle sur une jeune femme de 19 ans, Snyder a partagé un repas avec lui à Paris. Elle n’a pas osé l’affronter directement mais lui a dit qu’il était « malade » et qu’il avait besoin de thérapie.

Après la révélation, en 2017, d’accusations contre Rozon, elle a porté plainte auprès de la police de Montréal.

Lors de son témoignage, Snyder a exprimé un sentiment de culpabilité, se demandant si elle aurait pu empêcher d’autres femmes d’être victimes si elle avait parlé plus tôt.

« La loi qui protège le mieux les agresseurs est la loi du silence », a-t-elle déclaré.

Cependant, la plainte de Snyder n’a jamais été portée devant un tribunal pénal. Après avoir rencontré 14 victimes présumées, les procureurs du Québec n’ont retenu qu’une seule plainte, qui a conduit à des accusations de viol et d’agression indécente. Toutefois, en décembre 2020, un juge a déclaré Rozon non coupable, saisine que les témoignages avaient des « imprécisions » affectant la fiabilité de la plaignante.

Par la suite, un groupe de victimes se qualifiant de « courageuses » a déposé une action collective contre Rozon, qui a été rejetée par la Cour d’appel, mais les plaignants ont été invités à déposer des poursuites individuellement.

La juge de la Cour supérieure du Québec, Chantal Tremblay, entend les recours des neuf femmes lors d’un procès unique.

Bien que Snyder ne fasse pas partie des neuf plaignantes, son témoignage vise à démontrer que Rozon aurait un passé d’agressions sexuelles.

Rozon poursuit Snyder et Pénélope McQuade, animatrice à Radio-Canada, pour 450 000 $ en raison des commentaires qu’elles ont faits à son sujet à la télévision en 2020.

Rozon a nié les allégations portées contre lui. La semaine dernière, son équipe juridique a affirmé lors de l’ouverture du procès que les femmes avaient échangé leurs histoires, les « contaminant » mutuellement.

Cet article est basé sur un rapport de La Presse canadienne.

Points à retenir

Dans le cadre d’un procès civil, Julie Snyder a partagé son témoignage accablant face à son présumé agresseur, Gilbert Rozon, renforçant ainsi l’importance des voix de ceux qui ont été victimes d’agression sexuelle. Bien que la plainte de Snyder n’ait jamais abouti à un procès criminel, son intervention témoigne de la nécessité de briser le silence qui entoure ces violences. La dynamique de pouvoir à l’œuvre dans ces affaires met en lumière les défis auxquels font face les victimes, souvent intimidées par la crainte des répercussions sociales et professionnelles. L’engagement continu de la société à soutenir ces victimes et à s’attaquer aux causes profondes des agressions sexuelles demeure impératif.



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